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qu’il accuse peuvent tout nier en votre présence et la sienne.

— Il compte justement sur les dénégations de mon fils et de M. de Tavannes pour jeter le doute, le trouble dans mon esprit, car tout mauvais cas est niable ; aussi le cardinal espère-t-il profiter de mon indécision pour m’amener à approuver son projet ; en d’autres termes : mettre l’armée française entre les mains de l’Espagne et des Guisards !

— À ce point de vue, madame, le mensonge de M. le cardinal ne manquerait point d’habileté.

— Aussi ai-je feint et feindrai-je de donner dans le piège… Maintenant, mon révérend, je me résume en deux mots : guerre aux huguenots, guerre impitoyable tant qu’elle durera… et, ensuite, offrir ou accepter une paix qui soit leur tombeau… Est-ce entendu ?

— C’est entendu, madame… Je n’augurais pas si bien de ma mission… Dès demain, je repars, afin d’instruire le roi d’Espagne et le saint-père de vos engagements et des actes qui font foi de leur sincérité.

— Mon révérend, puis-je vous accorder quelque grâce ? Cela est acquis de droit à tout négociateur.

— Nous avons, madame, peu souci des biens ou des honneurs de ce monde ; je me bornerai à vous prier d’obtenir de votre fils le roi Charles IX qu’il change de confesseur…

— Et qu’il en prenne un de votre compagnie ?

— Oui, madame… Je connais un homme d’esprit fort accommodant ; il sait tout entendre, tout comprendre… et tout pardonner…

— Son nom ?

— Le révérend père Auger.

— N’a-t-il pas prêché à Paris avec succès ?

— Avec beaucoup de succès, madame.

— Je vous promets d’amener mon fils Charles à prendre le père Auger pour confesseur.

— Vous me le promettez formellement, madame ?