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— Cependant, madame… les édits de tolérance ont été accordés aux hérétiques après leurs insurrections.

— Vous en parlez, pardieu, bien à votre aise, mon révérend ! Est-ce que ces édits ne nous ont pas été arrachés par la force ?… Les catholiques sont de vrai très en majorité en France… Mais faut-il combattre, à peine le quart d’entre eux se rend sous les drapeaux ; presque tous les protestants, au contraire, prennent les armes pour leur cause : aussi qu’arrive-t-il en temps de guerre ? leur nombre militant égale, s’il ne surpasse, celui des catholiques. Des édits de tolérance nous ont été imposés, mais leur révocation a toujours suivi de plus ou moins près leur enregistrement. Je me résume : la sincérité de ma confession dépasse, dites-vous, vos espérances ? Tant mieux, mon révérend, si vous vous pénétrez fermement de ceci : que de tous points désintéressée dans la question religieuse par mon défaut absolu de religion, j’ai soutenu les huguenots tant qu’il m’a paru avantageux de les soutenir ; le contraire échéant, ils m’ont trouvée, ils me trouveront impitoyable…

— Ce sont là, madame, de simples assurances de bon vouloir… et non des faits…

— Ah ! des faits ?… Eh bien, mon révérend, vous me parliez tout à l’heure du duc des Deux-Ponts, général des huguenots allemands, venus à l’aide de Condé, de Coligny et de son frère Dandelot, chefs de l’armée protestante ?

— Dites les têtes de l’hydre d’hérésie, madame.

— Eh bien, mon révérend, l’hydre a déjà trois têtes de moins… D’abord le duc des Deux-Ponts…

— Quoi, madame… le duc des Deux-Ponts ?

— Mort… mon révérend.

— Et M. Dandelot ?

— Mort… mon révérend.

— Et M. le prince de Condé ?

— Mort… mon révérend.