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que le roi Charles IX se hâte d’exterminer l’hérésie ; il faut que le roi Charles IX cesse de conniver avec les criminels de lèse-majesté divine, sinon… notre saint-père, usant de ses pouvoirs spirituels, mettra terme à la désolation de la chrétienté. Le pieux concours de S. M. le roi d’Espagne est assuré aux catholiques français ; il leur offre ses trésors, l’appui de ses armes, pour venger notre sainte mère l’Église des opprobres dont on l’abreuve.

— Pour parler net, mon fils risquerait de se voir interdit et déposé par le saint-père ?

— Éventualité fâcheuse, madame.

— Mon révérend, je suppose le trône déclaré vacant par le pape… qui l’occupera ce trône ? La branche des Bourbons ? Non, elle est hérétique… et le premier occupant doit être bon catholique… Or, ce bon catholique ne serait-il pas, selon les vues de Rome et de l’Espagne, le jeune Henri de Guise, descendant de Charlemagne, si l’on en croit ces Lorrains ?

— Question temporelle, où je n’ai rien à voir, madame !… Seulement, il est notoire que le jeune Henri de Guise, fils du grand martyr d’Orléans, porte un nom cher à l’Église et à tous les bons catholiques, un nom enfin dont la popularité est immense.

— Fort bien… Ajoutez, mon révérend, que Philippe II, en retour de l’appui qu’il prêterait au jeune duc de Guise pour monter sur le trône de France, obtiendrait sans doute de ce nouveau souverain le démembrement de certaines provinces méridionales de notre royaume, depuis longtemps convoitées par l’Espagne ?

— Question temporelle, madame… ceci ne me regarde point.

— Ainsi, tel est le but de votre mission, mon révérend : une menace ?… Ah çà ! pourquoi m’imputer, à moi, femme, les lenteurs de la guerre contre les huguenots ?

— L’on pense, madame, et l’on croit que, par crainte de laisser grandir un général dont les victoires et l’influence vous porteraient ombrage, vous opposez. sans cesse les unes aux autres les rivalités des