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des huguenots. Enfin le meurtre du comte de Cipierre, en Provence, et de trente-cinq de ses coreligionnaires ouvre les yeux les moins clairvoyants ; la perte du parti protestant est jurée, malgré le second édit promulgué à Longjumeau. Le roi ordonne d’arrêter le prince de Condé et Coligny, revenus dans leurs domaines, où ils vivaient paisibles depuis la fin de la guerre ; instruits à temps par le maréchal de Tavannes, chargé de leur capture, mais incapable de cette félonie, ils s’échappent avec leurs familles et, après des traverses sans nombre, arrivent, le 18 septembre 1568, à La Rochelle. Ils sont bientôt rejoints par Jeanne d’Albret, reine de Navarre, accompagnée de son fils Henri de Béarn, à peine âgé de quinze ans ; cette femme héroïque vouait sa vie, ses biens, son royaume, ses enfants, à la cause de la réforme ; ralliant sur sa route les troupes volontaires levées par le colonel Piles, Montemar et Saint-Mégrin, elle entra dans La Rochelle avec quarante-deux enseignes (compagnies) d’infanterie et huit cornettes (escadrons) de cavalerie. Les autres chefs réformés, Ivoi et Blosset, soulevaient le Poitou ; Soubise, le Périgord ; Clermont, le Quercy ; Montgomery, la Normandie ; Lavardin, la Picardie ; de nombreux renforts, partis de ces contrées, s’acheminaient vers La Rochelle, rendez-vous général de l’armée protestante ; Niort, Fontenay, Saint-Maixent, Saintes, Saint-Jean-d’Angely, Cognac, Blaye et Angoulême s’insurgent. Cette fois encore, l’insurrection s’appuyait sur le bon droit ; car avant que ces mouvements fussent connus à la cour, le conseil de Charles IX, le 18 septembre 1568 (le jour même où Coligny et Condé devaient être arrêtés), rendait un arrêt enregistré par le parlement de Paris et interdisant, « sous peine de mort et de confiscation des biens, l’exercice de tout autre culte que le culte catholique ; ordonnant aux ministres de quitter le royaume sous quinze jours. Les huguenots qui abjureraient leur foi et rentreraient dans le giron de l’Église catholique seraient seuls amnistiés. » Le roi Charles IX déclarait enfin dans cet édit : « que c’était contre son gré qu’il avait précédemment toléré le culte hérétique ; mais qu’il avait toujours eu la ferme