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afin de n’être pas écrasés dans la lutte, appellent à leur tour l’étranger à leur aide ! Des troupes allemandes protestantes, au nombre de sept mille reîtres (ou cavaliers) et de quatre mille lanskenets (ou fantassins), passent la frontière ; l’amiral et Condé, sans artillerie, sans bagage, se mettent en marche à travers la Champagne afin d’opérer leur jonction avec ces auxiliaires, et déploient dans cette manœuvre une prodigieuse habileté d’hommes de guerre. Les provinces du Midi, aussi soulevées, organisent des compagnies de volontaires destinées à aller augmenter l’armée principale ; elles se recrutent en route des bandes insurgées du Rouergue et du Dauphinois, et rejoignent à Pont-à-Mousson, en Lorraine, Coligny, déjà rallié aux troupes allemandes. Mais le premier cri des reîtres et des lanskenets fut de demander de l’argent (cent mille écus) avant d’entrer en campagne ; l’armée réformée était pauvre. Coligny, Condé, les ministres, les capitaines, donnant un généreux exemple, se dépouillent de tout ce qu’ils possèdent afin de parfaire une partie de la somme ; cet exemple est suivi par tous les volontaires, et l’on réunit ainsi trente mille écus, dont les reîtres, touchés de tant de dévouement, se contentent. Coligny continue sa marche au cœur de l’hiver et parvient à amener, du fond de la Lorraine en Beauce, une armée de vingt mille hommes, sans magasins, sans artillerie, et toujours poursuivi par des forces supérieures. Il débloque Orléans, prend Blois et Beaugency, et vient mettre le siège devant Chartres, après avoir battu à Houdan un corps d’armée catholique commandé par M. de La Valette. Catherine de Médicis et le parti catholique, effrayés de cette nouvelle insurrection et de ses succès, proposent la paix, et non-seulement le rétablissement de l’édit d’Amboise, mais la complète liberté du culte pour les protestants, jusqu’à ce qu’il plût à Dieu que tous les sujets du roi fussent réunis en une même religion. Coligny, instruit par l’expérience, demande comme garantie de l’exécution de ce traité que certaines places fortes, dites de sûreté, restent au pouvoir des protestants ; Catherine de Médicis se récrie contre ce doute de sa bonne foi, jure