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Catherine de Médicis, au contraire, voyant dans ce Guisard un audacieux et dangereux rival dont elle subissait forcément l’influence, se réjouit de sa mort, si regrettée par les catholiques et par l’Espagne. Cette reine infâme allait enfin régner sans partage. Tutrice de Charles IX, tigre adolescent, elle craignait peu le cardinal de Lorraine, frère de François de Guise, et celui-ci ne laissait qu’un fils presque enfant. L’amiral de Coligny abhorrait les guerres civiles ; la nécessité de défendre sa vie et celle de ses coreligionnaires l’avait forcé de tirer l’épée ; il profita de la stupeur où la mort du duc de Guise plongeait les catholiques et du contentement qu’elle causait à la reine pour négocier avec elle. Il s’engagea, au nom des réformés, à déposer les armes si l’exercice du culte évangélique était autorisé ; le chancelier de L’Hôpital, resté au pouvoir dans l’espérance d’atténuer les malheurs dont il n’avait pu sauver la France, pressa la reine de consentir aux propositions de Coligny… L’insurrection devait, comme toujours, porter ses fruits, hélas ! ensanglantés ; ce que les réformés n’avaient pu obtenir par les plus humbles supplications, en invoquant le bon droit, la justice, ils l’obtinrent par la force ; et le 19 mars 1563 fut rendu, à Amboise, un édit qui, en attendant la majorité du roi et les décisions possibles d’un concile, « permettait à tous barons, châtelains, hauts justiciers, seigneurs, tenant pleins fiefs de haubert, de pratiquer librement dans leurs maisons, avec leurs familles et les habitants de leurs domaines, la religion qu’ils disent réformée. Elle était aussi autorisée dans les villes où elle se pratiquait avant le 7 mars de cette année ; mais, à l’avenir, elle ne serait autorisée que dans une ville par bailliage, et elle demeurerait complétement interdite à Paris et dans les villes, bourgs et villages de son ressort. Tous les arrêts contre les réformes rendus depuis le règne de Henri II étaient rapportés ; les confiscations non encore exécutées mises à néant ; le prince de Condé, l’amiral de Coligny et tous les autres chefs et soldats volontaires de l’insurrection protestante considérés comme bons et loyaux sujets,