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savoir : — si les républiques sont meilleures que la monarchie ? — à quoi si je voulais venir, encore voudrais-je savoir quel rang la monarchie doit avoir entre les républiques ? et si elle y en doit avoir aucun, pour ce qu’il est malaisé de croire qu’il y ait rien de public en ce gouvernement où tout est à un ?

» Je voudrais comprendre comment il se peut faire que tant d’hommes, tant de villes, tant de nations, endurent quelquefois un tyran seul, qui n’a puissance que celle qu’on lui donne ? qui n’a pouvoir de leur nuire que parce que l’on a de l’endurer ? Quoi ! un million d’hommes, misérablement asservis, ayant le cou sous le joug, non contraints par la force, mais enchantés, charmés par ce mot un, duquel ils ne doivent craindre ni la puissance, puisqu’il est seul, ni aimer les qualités, puisqu’il est, à leur endroit, inhumain et sauvage ; mais la faiblesse d’entre nous, hommes, est telle ! » (Pages 62-64.)

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« ……… Mais, ô bon Dieu ! que peut être cela ? comment dirons-nous que cela s’appelle ? quel malheur est celui-là ? ou quel vice ? Ou plutôt quel malheureux vice ? Voir un nombre infini, non pas obéir, mais servir ! non pas être gouvernés, mais tyrannisés ! n’ayant ni biens, ni parents, ni enfants, ni leur vie même qui soit à eux ! Souffrir les pilleries, les paillardises, les cruautés, non pas d’une armée, non pas d’un camp barbare, contre lequel il faudrait répandre son sang et risquer sa vie ; mais souffrir cela d’un seul ! Non pas d’un Hercule ou d’un Samson ; mais d’un seul hommeau, et le plus souvent du plus lâche, du plus efféminé de la nation ! non pas accoutumé à la poudre des batailles, mais encore à grand-peine au sable des tournois ! Appelons-nous cela lâcheté ? Dirons-nous que ceux-là qui restent asservis sont couards ? Que deux, que trois, que quatre, ne se défendent d’un, cela est étrange, mais toutefois possible ; et l’on pourra dire alors à bon droit que c’est faute de cœur. Mais si cent, si mille, endurent tout