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et les Flandres deviendraient françaises. » Ce plan devait séduire l’amiral à plusieurs titres ; il voyait un glorieux agrandissement de territoire pour son pays et il espérait diminuer pour l’avenir la chance des guerres civiles en ralliant pour l’expédition projetée catholiques et protestants sous le même drapeau ; enfin les Pays-Bas, fédérés en république sous l’autorité d’un prince protestant, seraient, en cas de nouvelles persécutions, une vaste contrée ouverte aux huguenots, où ils trouveraient plus de sûreté que dans les villes de refuge. Il engagea le prince de Nassau à se rendre auprès de Charles IX et de l’assurer que si la France appuyait le mouvement des Pays-Bas, il était, lui, Coligny, prêt à prendre le commandement de l’armée que l’on enverrait à leur secours. Le prince de Nassau arrive à la cour de France ; Charles IX et sa mère tressaillent d’une joie sinistre : ils peuvent enfin amener dans le piége, non-seulement Coligny, mais peu à peu les principaux chefs huguenots. Les communications du prince de Nassau sont, en apparence, très-favorablement écoutées par Catherine de Médicis ; mais elle objecte que la conduite de si graves intérêts exige impérieusement la présence de M. de Coligny à la cour ; la reine charge donc le prince de Nassau de retourner à La Rochelle et de répondre à l’amiral que Charles IX, frappé des immenses avantages que peut offrir à la France la conquête des Flandres, désire conférer promptement avec lui sur cette affaire importante. Coligny avait jusqu’alors obéi à ses défiances personnelles ; il les surmonta lorsqu’il espéra accomplir une entreprise glorieuse pour son pays et profitable à ses coreligionnaires. Il se rendit à la cour ; son départ de La Rochelle fut un deuil public ; les plus noirs pressentiments accablèrent ses amis ; Jeanne d’Albret elle-même, quoiqu’elle n’eût pas rompu les négociations relatives au mariage de son fils, supplia l’amiral de ne pas risquer de se livrer à ses ennemis. Il fut inflexible ; il s’agissait du bien public. Le 18 septembre 1571, Coligny rejoignait la cour à Blois. Le roi accueillit le vieillard avec effusion. « Maintenant, mon bon père, — lui dit Charles IX en l’em-