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Au temps de l’indépendance de la Gaule, fédérée en république, des siècles avant l’invasion romaine, la tribu des Santones occupait le territoire aujourd’hui appelé Saintonge, Aunis et Angoumois, provinces dont les capitales sont maintenant Angoulême, Poitiers, Saintes et La Rochelle, fertiles contrées baignées à l’ouest par l’Océan, au sud par la Gironde. Un demi-siècle avant J.‑C., la tribu des Santones prit part à la guerre des Gaules contre l’Espagne et à celle du brenn Bellovèse en Italie, où ils fondèrent la ville de Médiolan (Milan). Vint l’invasion romaine. Les Santones, unis aux Bretons de l’Armorique, coururent aux armes contre l’étranger, lutte héroïque où notre aïeul Joel, le brenn de la tribu de Karnak, entouré de ses enfants, hommes et femmes, combattit avec eux jusqu’à la mort contre les soldats de Jules César ; Bretons et Santones, vaincus par le nombre mais non découragés, se soulèvent de nouveau contre l’étranger à la voix patriotique des druides ; ils se joignent aux autres tribus gauloises insurgées et commandées par Vercingétorigh, le chef des cent vallons. Une fois encore écrasés par le nombre, nos pères succombent devant Alais, et la Gaule est asservie. Sous le règne de l’empereur Auguste, les Santones, impatients du joug étranger, se révoltent de nouveau ; et plus tard, Bagaudes courant la Bagaudie, Vagres courant la Vagrerie, comme nos aïeux Kervan-le-Bagaude et Ronan-le-Vagre, ils font une guerre de partisans aux derniers gouverneurs romains et aux premiers comtes franks ou leudes de Clovis, ce bandit couronné et sacré par l’Église. Mais les Santones n’étaient pas, comme les Gaulois de l’Armorique, défendus par l’Océan, par des montagnes, par des forêts, par des marais impraticables, contre la double invasion des évêques et des Franks ; les bardes, les druides, dont la voix exaltait le patriotisme des peuples, furent massacrés ; de faux prêtres du Christ leur succédèrent, prêchant aux conquis la sainteté de l’esclavage, la soumission, le respect envers leurs conquérants. Ces tribus, jadis si fières, si viriles, s’habituèrent au joug étranger, hébétées par de superstitieuses terreurs. Cependant les