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officiers de la couronne, tels que le prince de Condé, le roi de Navarre, Coligny, son frère Dandelot, et d’autres chefs protestants, assisteraient, en vertu de leur naissance ou de leurs fonctions, à l’ouverture des États, et si ces réformés refusaient de signer une profession de foi catholique, ils seraient suppliciés. Antoine de Bourbon, roi de Navarre, et le prince de Condé sont arrêtés à leur arrivée à Orléans ; Coligny s’attendait à partager leur sort, il adressa des adieux stoïques à ses enfants et à sa femme, qu’il chérissait, convint avec elle des mesures qu’elle aurait à prendre lorsqu’elle serait instruite de sa captivité ou de sa mort, puis il partit pour Orléans, avec cette intrépidité sereine puisée dans la conscience du devoir, et qui jamais ne l’abandonna. Son écuyer, nomme Nicolas Mouche, homme d’un cœur d’or, d’un courage à toute épreuve, et qui a suivi Coligny dans toutes ses campagnes, m’a raconté à moi, Antonicq Lebrenn, qui écris ceci, qu’aux environs d’Orléans Coligny rencontra un Huguenot fuyant cette ville, « — où déjà, — disait-il, — étaient arrivés trente à quarante des plus experts bourreaux des lieux circonvoisins ; on les avait habillés d’une même livrée, aux couleurs des draperies de l’échafaud où ils devaient trancher la tête du prince de Condé, du roi de Navarre, de Coligny et autres seigneurs hérétiques. Il devait y avoir, en outre, un grand massacre dans Orléans, et les habitants avaient l’ordre de ne sortir de leurs maisons, après midi sonné, ni regarder par les fenêtres, sous peine d’être pendus ; enfin le sac de la ville avait été promis aux gens de guerre.[1] » — Coligny sourit tristement et continua son chemin vers Orléans ; un hasard le sauva, lui et tant d’autres victimes destinées au massacre prémédité, organisé par les Guises, et tacitement approuvé par la reine-mère. François II, depuis longtemps malade et sous la domination absolue des Guises, mourut le 5 décembre 1560. L’on a dit que Catherine de Médicis n’avait trouvé d’autre moyen d’arracher son fils à une in-

  1. Régnier de la Planche, p. 725.