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incertain que l’heure à laquelle il lui plaira nous appeler ; nous devons donc toujours nous tenir si préparés que nous ne soyons pas surpris : ce pourquoi j’ai voulu faire le présent écrit, afin que ceux qui demeureront après moi entendent mes intentions, sachent ma volonté.

» En premier lieu, après avoir invoqué le nom de Dieu, je lui fais une confession sommaire de ma foi, le suppliant qu’elle me serve à l’heure à laquelle il lui plaira m’appeler, parce qu’il sait que je fais cette confession de cœur et d’affection.

» Je crois à ce qui est contenu au vieil et nouveau Testament comme étant la vraie parole de Dieu, à laquelle il ne faut ni ajouter ni retrancher, ainsi qu’elle l’enseigne. Enfin, je cherche en Jésus-Christ, et par lui seul, mon salut et la rémission de mes péchés, suivant ce qu’il a promis. Je souscris à la confession de foi de l’Église réformée en ce royaume ; je veux vivre et mourir dans cette foi, m’estimant bien heureux s’il faut pour cela que je souffre.

» Je sais que l’on m’accuse d’avoir voulu attenter aux personnes du roi, de la reine et de Messeigneurs, frères du roi ; je proteste devant Dieu que je n’en eus jamais ni envie, ni volonté. L’on m’accuse aussi d’ambition, à cause de la prise d’armes que j’ai faite avec les réformés ; je proteste que le seul intérêt de la religion et la nécessité de défendre ma vie et celle de ma famille m’ont fait prendre les armes. À ce sujet, je confesse que ma plus grande faute a été de ne pas assez ressentir les injustices et meurtres que l’on faisait de mes frères ; il a fallu que je fusse poussé à prendre les armes par les dangers, par les trames dont j’étais l’objet. Mais je le dis aussi devant Dieu, j’ai essayé par tous les moyens de pacifier, ne craignant rien tant que la guerre civile, prévoyant qu’elle apporterait après soi la ruine de ce royaume, dont j’ai toujours désiré la conservation. J’écris ceci parce que, ignorant l’heure à laquelle il plaira à Dieu de m’appeler, je ne veux pas laisser mes enfants notés d’infamie et de rébellion… »