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— Ainsi soit-il  ! — répètent ses soldats. La prière du matin est dite.


Pendant que l’amiral assistait religieusement à la prière dans la cour de son logis, l’un de ses serviteurs, fait prisonnier la veille par les royalistes et nommé Dominique, poursuivait l’exécution du crime tramé par le duc d’Anjou et son capitaine des gardes, nouvel assassinat qui inspirait à Catherine de Médicis et au jésuite Lefèvre tant de sinistres espérances.

De retour pendant la nuit du camp des catholiques, ce Dominique entre dans la chambre de M. de Coligny alors absent, et s’avance avec précaution, l’œil et l’oreille au guet, épiant de ci, de là s’il n’est ni vu ni entendu ; puis il s’approche d’une table où se trouve, à côté de plusieurs papiers, un vase de grès contenant un breuvage rafraîchissant que Coligny buvait habituellement chaque matin, et que préparait son fidèle écuyer Nicolas Mouche. Celui-ci assistait en ce moment à la prière du matin avec les autres serviteurs de la maison de son maître. Dominique seul s’était abstenu de ce devoir, comptant sur l’éloignement de ses camarades pour accomplir son forfait. En entrant dans la chambre de l’amiral, l’empoisonneur était pâle, il devint livide lorsque, d’une main tremblante, il saisit le vase de grès pour y jeter le poison… Il hésite pendant un moment… Élevé dans la maison de M. de Coligny, traité par lui avec une bonté paternelle… il songeait au passé… mais sa cupidité, excitée par les promesses du duc d’Anjou, étouffe toute pitié dans l’âme de l’assassin ; il tire de sa poche un sachet contenant une poudre grise, la verse dans le vase et l’agite plusieurs fois, afin de mélanger le poison au breuvage ; il replaçait le pot où il l’avait pris, lorsqu’il entend des pas au dehors de l’appartement ; il tressaille, s’éloigne brusquement de la table, et voit entrer Odelin Lebrenn. Celui-ci rapportait le casque de l’amiral. Ce casque, faussé la veille