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merci, monseigneur, merci ! de rendre de moi ce témoignage… je n’en suis pas tout à fait indigne !…

le franc-taupin. — Prince, cette hypocrite avait son masque au temps dont vous parlez ! Lisez cette lettre de la reine… vous apprendrez pourquoi sa fille d’honneur s’est jetée à dessein dans nos avant-postes et a demandé instamment à être conduite près de vous… Quant à ce flacon… (il se tourne vers Anna-Bell) contient-il, oui ou non, du poison ?…

anna-bell. — Je ne le nie pas… mais…

La jeune fille n’achève pas et frémit en voyant Frantz de Gerolstein tressaillir à cet aveu et lire rapidement la lettre de Catherine de Médicis ; puis il lève les yeux au ciel, ses mains retombent avec accablement, sa noble figure exprime le dégoût et l’horreur.

anna-bell, d’une voix déchirante. — Monseigneur, ne croyez pas aux apparences… Mon Dieu ! si vous saviez !…

Frantz de Gerolstein jette un regard glacé sur la fille d’honneur ; puis, détournant la tête avec aversion, il se dirige vers la porte de la chapelle.

le franc-taupin, à Anna-Bell. — Femme, si tu veux te confesser, dépêche-toi… le bûcher t’attend…

anna-bell s’élance vers le prince, tombe à ses pieds, embrasse ses genoux et s’écrie : — Monseigneur, ne m’abandonnez pas !… Si j’étais seule avec vous, je vous dirais tout !… Au nom de votre mère, daignez m’entendre ! voilà mon unique prière, monseigneur… daignez m’entendre sans témoin ! Ce n’est pas la mort que je redoute… c’est votre mépris !… Je n’oserais mentir en ce moment terrible ! Croyez-moi donc, je suis innocente !… je suis innocente ! ..

L’accent de la vérité pénètre souvent les cœurs les plus prévenus ; Frantz de Gerolstein, ému malgré lui, s’arrête et, contemplant la fille d’honneur avec une douloureuse pitié : — Soit… — lui dit-il, — je veux encore douter du crime dont on vous accuse… — Et jetant les yeux autour de lui, il remarque l’entrée de la sacristie, s’ouvrant