Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 11.djvu/11

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Jean de Lorraine et le duc Claude, pour faire curée du royaume. Les Guises, princes lorrains, voulaient à la fois être indépendants comme seigneurs étrangers, et jouir des privilèges des princes français ; ils haïssaient et voulaient primer la branche royale de Bourbon et écraser la maison de Montmorency ; ils prétendaient descendre de Charlemagne, et plus tard, ainsi que Karl Martel, père de Karl-le-Grand, ils devaient tendre au rôle de maires du palais, aspirant même à détrôner la dynastie régnante. La curée de la France se fit donc entre les Guises, les Montmorency et Diane de Poitiers ; elle convia aussi au partage le maréchal de Saint-André, son amant, l’amour d’Henri II ne suffisant pas à cette Messaline. Mais que de gens à pourvoir !… le duc Claude de Guise avait six enfants ; le connétable de Montmorency, cinq fils et trois neveux ; le maréchal de Saint-André, onze neveux ou parents, tous fort pauvres ; enfin, Diane de Poitiers tenait à enrichir ses filles bâtardes et ses gendres. Mais, grâce aux labeurs écrasants de Jacques Bonhomme et à la confiscation des biens des hérétiques, cette bande de vautours de cour se gorgeait à plein ventre. De nouvelles guerres étrangères désolent la Gaule ; les Guises, par intérêt de famille, poussent le faible Henri II à s’allier avec l’Angleterre contre l’Allemagne et à sommer Charles‑Quint de venir, en sa qualité de comte de Flandre, lui prêter foi et hommage, ainsi que tout grand vassal doit agir envers son suzerain. « — Je me rendrai au sacre du roi de France à la tête de cinquante mille lances, » — répond le fier et violent empereur ; mais il n’y vint point sur l’heure, trop occupé des luthériens d’Allemagne. Dans l’espoir de concilier la religion catholique et la réforme en les amenant à des concessions mutuelles, il avait engagé le pape Paul III à réunir un concile à Trente ; le pape, plus soucieux des intérêts de sa maison que du catholicisme, met à la réunion du concile cette condition : que Charles‑Quint accordera la souveraineté du duché de Parme et de Plaisance à Louis Farnèse, son fils, à lui, Paul III (ces vicaires de Dieu ont presque tous des bâtards) ; mais n’obtenant pas ce qu’il attendait de Charles‑-