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« — Apportez votre argent !… apportez !… apportez !… »

Les premiers rangs de la foule s’ébranlaient afin de répondre à l’appel du trafiquant d’indulgences ; mais contenant du geste ces empressés, il reprit :

« — Un mot encore, mes chers frères ! Vous voyez ces confessionnaux décorés des armes de notre saint-père ? les prêtres qui vont vous y entendre représentent les pénitenciers apostoliques de Rome lors d’un grand jubilé ; ceux qui voudront prendre part aux trois principales indulgences entreront dans ces confessionnaux et feront connaître en conscience au pénitencier de combien d’argent ils peuvent se priver pour obtenir les grâces suivantes :

» La première est la rémission absolue de tous les péchés passés, présents ou futurs.

» La seconde est la participation à toutes les œuvres et mérites de la sainte Église catholique, apostolique et romaine, tels que jeûnes, prières, pèlerinages.

» La troisième… soyez bien attentifs, mes frères, aux derniers les bons ! comme dit le proverbe… cette indulgence-là dépasse tout ce que peuvent espérer les plus fidèles croyants !… »

— Écoute, — dit tout bas fra‑Girard à Hervé, — écoute… et repens-toi d’avoir douté des ressources de la foi…

— Oh ! je ne doute plus, et pourtant j’ose à peine espérer… — murmura d’une voix pantelante le fils de Christian, tandis que le dominicain s’écriait :

« — La troisième grâce, mes frères, vous donne le droit de vous choisir un confesseur qui, toutes les fois que vous craindrez de mourir, sera tenu, en vertu de la lettre d’absolution que vous aurez payée, reçue, et dont vous lui donnerez connaissance, sera tenu, dis-je, de vous accorder l’absolution, non-seulement des péchés que vous aurez commis, mais des plus grands crimes dont la rémission est réservée au siège apostolique, à savoir : la bestialité, le péché contre nature, le parricide et l’inceste… »