Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 10.djvu/67

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

chevaux houssés de caparaçons noirs semés de larmes d’argent. Les quatre faces de ce chariot, très-élevé, formaient une sorte d’immense transparent quadrangulaire et intérieurement éclairé, où étaient représentés, au milieu d’un océan de flammes, des hommes, des femmes, des enfants, des vieillards, plongés jusqu’à mi-corps dans cette fournaise, et élevant avec des contorsions désespérées leurs mains suppliantes vers une image de Dieu, assis sur un trône ; à chacune des faces du transparent, et surmontant ces peintures, l’inscription suivante se lisait écrite en grosses lettres rouges et noires :

priez
pour les âmes du purgatoire
demain
en
l’église du couvent de saint-dominique
L’INDULGENCE
élèvera son trône
priez et donnez
pour les pauvres âmes du purgatoire.

Quatre moines, munis de longs bâtons dorés, terminés par des lanternes de verre, sur lesquelles on voyait aussi peintes des âmes en peine, marchaient de chaque côté du char, suivis par d’autres dominicains portant un grand crucifix argenté. Les moines entonnèrent en chœur d’une voix retentissante ce psaume lugubre de la pénitence :

« De profundis clamavi ad te, Domine ;

» Domine, exaudi vocem meam.

» Fiant aures tuæ intendentes

» In vocem deprecationis meæ ! »

Le bruit des sonnettes et des crécelles succéda de nouveau à ces chants funèbres, pendant que la procession continuait son chemin ; un autre détachement d’archers du guet fermait la marche. Une multitude d’hommes et de femmes déguenillés, à figures cyniques