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— J’ai oublié de te faire quitter les éperons ; ôte-les pendant que je vais aller payer le cabaretier, tu m’attendras sur la route, hors de la maison.

— Mon oncle, puis-je mettre dans ma besace quelques petits présents que je rapporte d’Italie pour notre famille ?…

— Sans doute, — répondit le franc-taupin, navré des illusions d’Odelin ; et pendant que celui-ci entrait dans l’écurie pour quitter ses éperons et prendre dans sa valise les objets qu’il désirait emporter, Joséphin alla payer le cabaretier ; celui-ci, renfermé dans la salle des buveurs, n’ayant pu voir descendre de la chambre haute Odelin vêtu en capucin, dit à l’aventurier en recevant son argent :

— Vous nous quittez donc, mon révérend ?

— Oui, avec un novice de notre ordre, à qui j’avais donné rendez-vous ici.

— Vous allez à Paris pour assister comme les autres religieux à la grande cérémonie ?

— Quelle cérémonie ?

— Une superbe procession… Un voyageur passait tout à l’heure il nous a dit que les cloches et les carillons sonnaient à tout rompre ; depuis ce matin, toutes les maisons des rues que doit traverser la procession sont tapissées par ordre du lieutenant criminel, et à chaque fenêtre, il doit y avoir une torche allumée. On dit que le roi, la reine et tous les princes assisteront à la cérémonie… la plus belle qu’on aura jamais vue… Vous êtes bien heureux d’aller la voir, vous !

— Très-heureux. Bonsoir, mon hôte. — Joséphin alla rejoindre son neveu qui l’attendait à la porte de l’auberge, et se dit : — Quelle peut être cette cérémonie dont parle le cabaretier ? Peu importe ! Il nous sera plus facile, au milieu de la foule dont les rues seront remplies, de gagner sûrement la retraite où nous attend Estienne.

Le franc-taupin et son neveu se dirigèrent vers Paris, où ils arrivèrent alors que le soleil commençait de décliner à l’horizon.