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faite par son oncle à l’armurier, se dirigeait, ainsi que lui, vers l’auberge, se demandant avec une surprise croissante comment le franc-taupin était devenu capucin ? Celui-ci rabattit le capuchon de son froc, précéda les deux voyageurs dans la cour du cabaret, où s’ouvrait la porte de l’écurie ; maître Raimbaud dit à Odelin :

— Desselle nos chevaux, mon ami, donne-leur la provende, puis tu viendras nous rejoindre.

— Quoi, maître Raimbaud, nous restons ici, et nous sommes à peine à deux heures de marche de Paris ?

— Occupe-toi des chevaux, mon garçon ; je t’apprendrai plus tard pourquoi nous séjournons dans cette auberge.

Odelin, se disposant à obéir à son patron, descendit lestement de cheval, puis se jeta au cou du franc-taupin, lui disant d’une voix entrecoupée par de douces larmes :

— Bon et cher oncle ! ma mère, mon père, ma sœur, mon frère, tout le monde est en bonne santé à la maison ?

Joséphin, sans répondre à son neveu, le serrait dans ses bras avec une tendresse passionnée ; l’enfant sentit couler sur ses joues les pleurs brûlants tombés de l’œil de l’aventurier.

— Mon oncle, vous pleurez ?

— De joie, mon enfant ! — répondit Joséphin d’une voix sourde et entrecoupée ; — c’est la joie de te revoir ! — Et se dégageant des bras de son neveu, il ajouta : — Tu viendras nous rejoindre tout à l’heure ; tu demanderas à l’aubergiste de t’indiquer la chambre haute qui donne sur la route. — Et se tournant vers l’armurier : — Venez, maître Raimbaud, venez…

Odelin, tout joyeux de sa rencontre avec son oncle, et se disant qu’après tout le moment si impatiemment attendu par lui de revoir sa famille ne serait que peu retardé, s’occupa de desseller les chevaux, de leur donner leur provende ; puis l’aimable enfant, dans son empressement d’offrir au franc-taupin les petits présents qu’il lui rapportait d’Italie, chercha dans sa valise le flacon de vin d’Imola et la