et lorsque ces soldats entreront chez vous, ils n’y trouveront personne…
— Je comprends votre projet, — reprit Robert Estienne. Et se tournant vers Christian, qui, aidé d’Ernest Rennepont, soutenait Hêna, frissonnant de terreur : — Adieu, Christian… du courage, du sang-froid, rien n’est perdu… — Et, suivi du pasteur, il se dirigea vers la grille au moment où le jardinier apportait sur son épaule une longue échelle.
— En dehors des murailles du jardin, — demanda le franc-taupin à Michel, — y a-t-il une grande route ou des champs ?
— Des champs, monsieur, séparés du mur par un sentier et une haie.
Joséphin prêta l’oreille du côté de la grille ; et remarquant l’apaisement des clameurs des archers, s’écria :
— Courage… bon espoir… M. Estienne parlemente avec les soldats ; nous aurons le temps de fuir… — Et s’adressant au jardinier, porteur de l’échelle : — Conduis-nous vite à l’extrémité du jardin…
Michel devance les fugitifs dans une longue avenue, et au bout de trois cents pas, il s’arrête devant une muraille où il applique son échelle.
— Dépêchons-nous, — dit le franc-taupin, prêtant de nouveau l’oreille au loin ; — les archers deviennent menaçants, ils vont forcer la grille.
Christian gravit le premier l’échelle, atteint le chaperon du mur, s’y place à cheval, et, se baissant, tend ses mains à Hêna, qui monte après lui ; puis il la soutient, la tenant enlacée entre ses bras, l’assied et la maintient près de lui sur la crête de la muraille, où parviennent tour à tour Ernest Rennepont et l’aventurier. Celui-ci, attirant l’échelle à lui, à l’aide du jardinier, la fait basculer ; bientôt elle est dressée de l’autre côté du mur, les fugitifs descendent un à un dans un sentier bordé d’une haie haute et épaisse…
— Sauvée ! — s’écrie Christian en serrant passionnément Hêna contre sa poitrine, — sauvée, pauvre enfant !…