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ploi. Ils déclarent enfin l’impôt levé non de par le bon plaisir et le droit absolu de la royauté, mais par don et octroi volontaire de l’Assemblée nationale. De nouvelles discordes viennent encore épuiser, désoler le pays, nouveaux désastres causés par l’ambition, la cupidité des princes de la famille royale. Le duc d’Orléans dispute la régence à Anne de Beaujeu ; les ducs de Bretagne, de Bourbon, et d’autres princes se liguent avec lui contre la régente, et sauf une trêve de quelques mois, cette guerre civile dure cinq ans. La Bretagne, après la défaite de son duc, est réunie à la couronne de France, en 1491, autant par la force des armes que par le mariage d’Anne, héritière de cet apanage, avec Charles VIII. Bientôt celui-ci rêve une conquête insensée, celle des royaumes de Naples et de Constantinople ; afin de n’être pas inquiété par ses voisins durant les folles guerres qu’il médite, ce prince abandonne le Roussillon au roi d’Espagne Ferdinand-le-Catholique, monstre couronné, cède l’Artois et la Franche-Comté à Maximilien, empereur d’Allemagne ; et ouvrant ainsi le territoire à l’étranger par l’abandon de ces trois provinces, il renonce aux contrées les plus florissantes de la Gaule pour tenter des conquêtes aussi hasardeuses que lointaines. En 1491, Charles VIII se dispose à entrer en Italie et s’arrête à Lyon pendant quelque temps. J’ai lu dans un récit du temps, par Arnold Ferron (ch. IV, p. 75) :

« … Le roi Charles VIII ne parut occupé que de son amour pour les plus belles femmes de Lyon ; il les invitait à ses festins, il leur désignait des retraites secrètes où ces femmes, qu’il avait séduites, devaient le rencontrer ; et il trouvait des hommes parmi la noblesse qui se faisaient avec empressement les ministres et entremetteurs de ses plaisirs. Ainsi il abrégeait les jours par les repas, et les nuits se prolongeaient dans les voluptés. » Après quelques semaines si bien employées, Charles VIII envahit l’Italie à la tête d’une armée composée de soldats de toutes les nations : Français, Allemands, Suisses, Italiens ; dans cette guerre féroce, les envahisseurs, craignant à chaque pas d’être empoisonnés ou assassinés, massacraient leurs