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— assurer le bonheur d’une épouse, élever des enfants dans l’amour et la pratique du juste et du bien, leur donner le pain de l’âme et le pain du corps !… »

Ah ! ces réformés, ces hérétiques, sont restés fidèles aux préceptes divins ; leurs pasteurs sont époux et pères…

… Je me suis interrompu, les chants de l’orgie viennent de pénétrer jusqu’au fond de ma cellule ; les mystères de corruption effrénée, de débauche immonde dont ce couvent et celui des Augustines sont le honteux théâtre soulèvent plus que jamais mon cœur de dégoût et d’horreur !… Ah ! le célibat des moines !… ah ! le célibat des nonnes !…


… Non, mon chaste amour, pur de toute espérance, ne m’inspire pas seul ces réflexions sur le célibat des prêtres, source de tant de scandales ! non !… Avant d’avoir rencontré Hêna chez Marie-la-Catelle, vous le savez, ô mon Dieu ! j’étais frappé de la justice des réformes réclamées en votre nom par les luthériens ; j’étais en communion avec eux, sinon des lèvres, du moins du fond de l’âme. L’adoration idolâtre des images et des saints, la sacrilège arrogance d’un clergé se prétendant ton représentant infaillible, incarné, ô mon Dieu ! la confession, qui livre à des inconnus les secrets les plus intimes du foyer domestique, la rédemption des péchés et des âmes mise à prix d’argent, tant d’iniquités impies, tant d’outrages à la morale évangélique, depuis longtemps m’indignaient ; la haine dont je suis poursuivi dans ce couvent, la réclusion que l’on m’impose, n’ont d’autres motifs que ma sympathie hautement avouée pour la réforme… et l’enseignement véritablement chrétien que je donnais aux enfants chez Marie-la-Catelle, dernièrement emprisonnée, dit-on, comme hérétique.