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ques endurcis, furent reconnus et saisis par les espions du lieutenant criminel, postés depuis le milieu de la nuit à la porte Montmartre ; Jean Dubourg et Laforge, marchant à quelques pas derrière Marie-la-Catelle et cédant à un mouvement généreux, coururent à elle et, pour cela seulement qu’ils la connaissaient, furent comme elle arrêtés, garrottés. Christian sut aussi plus tard que la réunion des réformés à Montmartre avait été découverte par Lefèvre : celui-ci, guidant les recherches du sergent dans le galetas et remarquant, épars sur le plancher, quelques débris de lettres de convocation écrites par Jean Calvin où se lisait le mot Montmartre, courut communiquer ses soupçons au lieutenant criminel. Il mit le guet en campagne ; mais à leur entrée dans la carrière, les archers, se trouvant en face de seigneurs et de gens d’épée résolus à leur résister, n’osèrent point les arrêter.

Christian descendit de la charrette au milieu de Paris et se dirigea en hâte vers sa maison ; il arrivait sur le pont au Change, lorsqu’il vit accourir à lui le franc-taupin ; celui-ci, après avoir guetté toute la nuit le retour de l’artisan, l’instruisit de l’arrestation de sa femme, de ses enfants, du danger dont il était menacé s’il rentrait chez lui, et le décida à se rendre aussitôt dans un refuge assuré.


Hêna Lebrenn, séparée de sa mère, fut conduite et enfermée au couvent des Augustines ; elle raconta les suites de son arrestation dans la lettre suivante, qui devait être remise à Brigitte.


LETTRE D’HÊNA LEBRENN,
en religion, sœur sainte françoise-au-tombeau.


Décembre 1534. — Au couvent des Augustines. ......

Joies du ciel ! l’on m’assure, bonne mère, que tu liras cette lettre ! Mon Dieu ! mes idées se troublent ; je voudrais pouvoir te dire à la fois tout ce qui m’est arrivé depuis notre séparation jusqu’à