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— Il ne pouvait l’être, monsieur ; je devais me rendre à l’appel de celui dont je partage les doctrines et qui mérite à tant de titres l’estime et l’affection de ma mère.

— Les deux personnes dont vous êtes accompagné, monsieur de Coligny, sont des nôtres ?

— Oui, monsieur ; l’un est français, l’autre étranger, tous deux voués à notre cause. J’ai cru pouvoir les amener à notre réunion ; je réponds d’eux comme de moi-même. Me permettrez-vous, monsieur Calvin, de vous les présenter ? L’un est un prince d’Allemagne, Karl de Gerolstein, cousin du prince des Deux-Ponts, et comme lui l’un des plus valeureux partisans de Luther ; mon autre ami, fils puîné de M. le comte Neroweg de Plouernel, l’un des plus grands seigneurs de Bretagne et d’Auvergne, est pour la réforme aussi zélé que l’est son frère aîné pour le maintien de l’Église de Rome.

— Tristes divisions du foyer domestique ! — dit Jean Calvin en soupirant. — Espérons que la lumière évangélique éclairera, pénétrera tous les cœurs de la grande famille du Christ !

— Puisse cette ère de paix et de concorde venir bientôt, monsieur Calvin, — répondit Gaspard de Coligny ; — l’avénement de cet heureux jour est vivement désiré par mon ami Gaston, vicomte de Plouernel, capitaine au régiment de Bretagne. Il a, de tout son pouvoir, propagé la réforme dans sa province ; et pour vous le peindre d’un trait, j’ajouterai que souvent, ma mère m’a dit que je ne pouvais choisir un ami plus sage, plus méritant que Gaston de Plouernel…

— Le jugement d’une mère, et d’une mère telle que madame de Coligny, ne saurait s’égarer dans le choix des amis de son fils, — répondit Jean Calvin. — Notre cause est celle de tous les gens de bien. Je désire témoigner à vos amis ma reconnaissance du concours qu’ils nous apportent.

Gaspard de Coligny alla rejoindre ses amis afin de les prévenir du désir de Jean Calvin.