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Ceci se passait, fils de Joel, à la fin du règne de Charles VII, ce dévot qui disait ses heures canoniaux et menait très-sainte vie (dit ici le chroniqueur), en ayant un sérail comme le sultan des Turcs.


Moi, Christian Lebrenn, fils de Mélar et petit-fils de Stéphan Lebrenn, qui eut pour père Allan et pour aïeul Mahiet-l’Avocat d’armes, témoin du supplice de Jeanne Darc à Rouen, je veux, avant d’ajouter une nouvelle légende et une nouvelle relique à celles de notre famille, relater sommairement ici les principaux événements des règnes de Louis XI, de Charles VIII et de Louis XII ; j’y ajouterai ce qui s’est passé de plus important sous la royauté de François Ier jusqu’à l’année 1534, où commence le récit écrit par moi. Mon grand-père avait laissé à mon père, et mon père m’a laissé cette lacune à remplir ; à l’aide de quelques notes, j’ai complété ces renseignements par des informations prises à Paris auprès de personnes très-bien instruites de l’histoire du dernier siècle et de celui-ci, entre autres MM. Henri et Robert Estienne, grands érudits, célèbres imprimeurs chez qui mon père, moi et mon fils aîné, nous avons été employés en qualité d’artisans d’imprimerie.


Le 22 juillet de l’an 1461, Louis XI, fils de Charles VII et de Marie d’Anjou, né à Bourges le 3 juillet 1423, monta sur le trône. Autant son père s’était montré indolent, peu soucieux des affaires de l’État, abandonné à ses conseillers ou à ses favoris, autant Louis XI se montrait actif, jaloux de sa puissance ; il n’aimait personne, se méfiait de tout le monde. Froidement calculateur, ne ressentant ni pitié, ni colère, ni affection, ni entraînement, il se bornait à faire le mal nécessaire à la réussite de ses projets ; en ce cas, il allait jusqu’aux plus terribles extrémités. Plein de défiance, de mépris pour les hommes, comptant uniquement sur les ténébreuses ressources de