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fils Stéphan Lebrenn, afin que tu transmettes ce legs à notre descendance. Tu inscriras dans nos annales les événements de ta vie qui pourraient offrir quelque enseignement à notre lignée.

Peut-être, si tu mourais sans enfants ou sans parents dignes d’hériter de notre légende, devrais-tu la léguer à un ami éprouvé, à la condition de la faire imprimer. Mon aïeul Mahiet me l’a dit souvent : L’histoire de notre obscure famille plébéienne est l’histoire de notre race, à nous Gaulois asservis, depuis la conquête franque. Ce livre ainsi reproduit, répandu, grâce à la nouvelle et prodigieuse découverte de l’imprimerie, serait peut-être de quelque utilité pour nos frères du peuple. Mais si tu revis dans des enfants, ô mon Stéphan, transmets-leur pieusement notre chronique, ainsi que je te la transmets.


Allan Lebrenn est mort à Vaucouleurs, le 11 décembre de l’année 1461, quelques mois après avoir sommairement retracé dans les lignes précédentes les principaux événements de la fin du règne de Charles VII (depuis la mort de notre aïeul Mahiet-l’Avocat d’armes).

Moi, Christian Lebrenn, petit-fils de Stéphan, j’ai lu dernièrement dans une chronique contemporaine, dont l’auteur se nomme Jacques Duclerc, le portrait suivant de Charles VII (liv XXIX, p. 231) ; je le joins à notre légende à l’appui du jugement porté par Allan Lebrenn sur ce misérable roi qui abandonna Jeanne Darc aux fureurs de l’Inquisition et causa la mort de Jacques Cœur, après l’avoir dépouillé :

« … Icelui, le roi Charles VII, menait très-sainte vie et disait ses heures canoniaux ; et quoiqu’il se continuât au service de Dieu, lorsque la belle Agnès fut morte, le roi s’enamoura de la nièce de ladite Agnès, mariée au seigneur de Villequier. Elle était aussi belle que sa tante, et son mari se tenait avec elle à la cour ; elle avait toujours cinq à six damoiselles des plus belles de France et de