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CHAPITRE VI.


Comment le marchand de toile, qui n’était point sot, fit-il le simple homme au vis-à-vis du comte de Plouernel, et ce qu’il en advint. — Comment le colonel reçut l’ordre de se mettre à la tête de son régiment parce que l’on craignait une émeute dans la journée.




M. Lebrenn était si absorbé dans ses pensées, qu’il tressaillit comme en sursaut lorsque M. de Plouernel entra dans le salon.

Malgré son empire sur lui-même, le marchand de toile ne put s’empêcher de trahir une certaine émotion en se trouvant face à face avec le descendant de cette ancienne famille. Ajoutons enfin que M. Lebrenn avait été instruit par Jeanike des fréquentes stations du colonel devant les carreaux du magasin ; mais, loin de paraître soucieux ou irrité, M. Lebrenn prit un air de bonhomie naïve et embarrassée, que M. de Plouernel attribuait à la respectueuse déférence qu’il devait inspirer à ce citadin de la rue Saint-Denis.

Le comte, s’adressant donc au marchand avec un accent de familiarité protectrice, lui montra du geste un fauteuil en s’asseyant lui-même, et dit:

— Ne restez pas ainsi debout, mon cher monsieur… asseyez-vous, je l’exige…

— Ah ! monsieur, — dit M. Lebrenn en saluant d’un air gauche, — vous me faites honneur, en vérité…

— Allons, allons, pas de façon, mon cher monsieur, — reprit le