cer la fin du combat, alla donner ses soins au blessé, tandis que Joel dit à l’inconnu en lui tendant la grande coupe :
— Ami hôte, tu vas boire ce vieux vin au triomphe de Julyan…
— Je bois au triomphe de Julyan et aussi à la vaillante défaite d’Armel ! — répondit l’étranger ; — car le courage du vaincu égale le courage du vainqueur… J’ai vu bien des combats ! mais jamais déployer plus de bravoure et d’adresse !… Gloire à ta famille, Joel !… gloire à ta tribu !…
— Autrefois, — dit Joel, — ces combats du festin avaient lieu chez nous presque chaque jour… maintenant ils sont rares, et se remplacent par la lutte ; mais le combat au sabre sent mieux son vieux Gaulois.
Mamm’Margarid, après avoir examiné le blessé, secoua deux fois la tête, pendant que Julyan soutenait son ami adossé à la muraille ; une des jeunes femmes se hâta d’apporter un coffret rempli de linge, de baume, et contenant un petit vase rempli d’eau de gui. Le sang coulait à flots de la blessure d’Armel ; ce sang, étanché par Mamm’Margarid, laissa voir la figure pâle et les yeux demi-clos du vaincu.
— Frère Armel, — lui disait Julyan de bonne amitié en se tenant à genoux près de lui, — frère Armel, ne faiblis pas pour si peu….. chacun son heure et son jour… Aujourd’hui tu es blessé, demain je le serai… Nous nous sommes battus en braves… L’étranger se souviendra des jeunes garçons de Karnak, et de la famille de Joel, le brenn de la tribu.
Armel, le visage baissé sur sa poitrine, le front couvert d’une sueur déjà glacée, ne paraissait pas entendre la voix de son ami. Mamm’Margarid secoua de nouveau la tête, se fit apporter sur une petite pierre des charbons allumés, y jeta de l’écorce de gui pulvérisée : une forte vapeur s’éleva des charbons, et Mamm’Margarid la fit aspirer à Armel. Au bout de quelques instants il ouvrit les yeux, regarda autour de lui comme s’il sortait d’un rêve… et dit enfin d’une voix faible :