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— ajouta M. Lebrenn en indiquant à ses enfants un livret auprès du quel était placée la faucille d’or. Ce livret, ainsi que les plus anciens de ceux que l’on voyait sur la table, se composait d’un grand nombre de feuillets oblongs de peau tannée (sorte de parchemin), jadis cousus à la suite les uns des autres en manière de bande longue et étroite, mais, pour plus de commodité, ils avaient été décousus les uns des autres et reliés en un petit volume, recouvert de chagrin noir, sur le plat duquel on lisait en lettres argentées :

An 57 av. J.-C.

— Mais, mon père, — dit Sacrovir, — je vois sur cette table un livret à peu près pareil à celui-ci, à côté de chacun des objets dont vous nous avez parlé ?…

— C’est qu’en effet, mes enfants, chaque relique provenant d’un des membres de notre famille est accompagnée d’un manuscrit de sa main, racontant sa vie et souvent celle des siens.

— Comment, mon père ? — dit Sacrovir de plus en plus étonné ; — ces manuscrits ?…

— Ont tous été écrits par quelqu’un de nos aïeux… Cela vous surprend, mes enfants ? Vous avez peine à comprendre qu’une famille inconnue possède sa chronique, comme si elle était d’antique race royale ? puis vous vous demandez comment cette chronique a pu se succéder, sans interruption, de siècle en siècle, depuis près de deux mille ans jusqu’à nos jours ?

— En effet, mon père, — dit le jeune homme, — cela me semble si extraordinaire…

— Que cela touche à l’invraisemblance, n’est-ce pas ? — reprit le marchand.

— Non, mon père, — dit Velléda, puisque vous affirmez que cela est ; mais cela nous étonne beaucoup !

— Sachez d’abord, mes enfants, que cet usage de se transmettre, de génération en génération, soit oralement, soit par écrit, les tra-