— Mille diables !… Il y serait donc allé alors ? se dit à demi-voix le nouveau venu.
Il allait quitter le magasin aussi précipitamment qu’il y était entré, lorsque, se ravisant et s’adressant à Jeanike :
— Mon enfant, dès que M. Lebrenn sera de retour, dites-lui d’abord que Dupont est venu.
— Bien, monsieur.
— Et que si, lui, monsieur Lebrenn… ajouta Dupont en hésitant comme quelqu’un qui cherche une idée ; puis, l’ayant sans doute trouvée, il ajouta couramment : Dites, en un mot, à votre patron que s’il n’est pas allé ce matin visiter sa provision de poivre, vous entendez bien ? sa provision de poivre, il n’y aille pas avant d’avoir vu Dupont… Vous vous rappellerez cela, mon enfant ?
— Oui, monsieur… Cependant, si vous vouliez écrire à monsieur Lebrenn ?
— Non pas, dit vivement Dupont ; c’est inutile… dites-lui seulement…
— De ne pas aller visiter sa provision de poivre avant d’avoir vu monsieur Dupont, reprit Jeanike. Est-ce bien cela, monsieur ?
— Parfaitement, dit-il. Au revoir, mon enfant.
Et il disparut en toute hâte.
— Ah çà, mais ! monsieur Lebrenn est donc aussi épicier, dit Gildas d’un air ébahi à sa compagne, puisqu’il a des provisions de poivre ?
— En voici la première nouvelle.
— Et cet homme ! il avait l’air tout ahuri. L’avez-vous remarqué ? Ah ! Jeanike, décidément c’est une étonnante maison que celle-ci.
— Vous arrivez du pays, vous vous étonnez d’un rien… Mais que je vous achève donc mon histoire de dragon.
— L’histoire de cet épervier à épaulettes d’or et à aigrette sur son casque, qui s’était arrêté à vous regarder à travers les carreaux, Jeanike ?
— Ce n’est pas moi qu’il regardait.