bon goût et la bonne grâce, la loyauté, le courage et l’esprit sont partout à leur place, et ils sont doublement bien venus lorsque la modestie leur prête un charme de plus ; aussi, dans le cas où, par ma présence, je pourrais, moi qui sais vous apprécier à votre juste valeur, mon cher monsieur Maurice, dans le cas où je pourrais, dis-je, vous aider à vaincre une défiance de vous-même que rien ne justifie, je serais très-capable de m’inviter, ainsi qu’une ou deux femmes de mes amies, au souper que vous offre M. d’Otremont…
— Ah ! madame, — reprit Richard, — je n’osais compter sur cette bonne fortune !
— Eh bien ! c’est convenu… après-demain soir, M. Dumirail voudra bien venir me prendre chez moi, et si, d’aventure, chose d’ailleurs plus qu’improbable, quelques récalcitrants se rencontraient parmi ces messieurs de votre comité, j’ai la prétention, peut-être outrecuidante, de les convaincre qu’ils devront s’empresser d’admettre parmi eux M. Dumirail.
Ce disant, madame de Hansfeld, d’un coup d’œil expressif, engagea M. d’Otremont à se retirer. Il se leva, et, tendant la main à Maurice :
— Au revoir, monsieur ! Je suis enchanté d’avoir eu l’honneur de faire connaissance avec vous, et, quoique nos relations soient toutes nouvelles, je vous prie de me compter au nombre de vos amis.
— Si peu de droits que j’aie à cette amitié si flatteuse pour moi, je l’accepte, monsieur, et vous en remercie du fond de l’âme, — repartit le candide Maurice, répondant avec effusion à l’étreinte de Richard.
Celui-ci baisa galamment la main de madame de Hansfeld et quitta le boudoir en songeant à part soi :
— Non, jamais je ne tuerai ce pauvre garçon-là !… Mais quel est ce mystère ?… Pourquoi Antoinette veut-elle sa mort ?… Ah ! démon !… jamais elle ne m’a paru plus attrayante qu’aujourd’hui. Qu’elle est belle ! qu’elle est belle !… Dieu me damne ! si elle ne m’avait instruit de ses projets, je serais, je crois, jaloux de cet hercule… et alors, ma foi ! chacun pour soi, et le champ clos pour tous !