me priver du plaisir de votre excellente compagnie ; votre présence n’ayant plus ici de but, je préfère recevoir mon jeune provincial tête à tête.
— Mais, madame, reprit M. d’Otremont de plus en plus indigné, vous n’y songez pas !
— À quoi… est-ce que je ne songe pas ?
— Ce que vous me proposez là, madame… ce que vous me proposez là…
— Eh bien ?…
— Mais, madame… c’est un assassinat !
— Monsieur… un mot… s’il vous plaît ?
— Je vous dis, madame, que ce que vous me proposez là… est un lâche assassinat…
— Est-ce tout, monsieur ? Voulez-vous maintenant m’entendre ?
— Vous m’épouvantez !…
— Est-ce que par hasard, monsieur, lorsque vous avez tué en duel le jeune de Monbreuil, vous l’avez assassiné ?
— Il m’avait insulté, provoqué, madame.
— Et qui vous dit, de grâce, monsieur, que mon provincial ne vous provoquera pas, ne vous insultera pas ? Et alors… que ferez-vous, s’il vous plaît ?
— En ce cas, — balbutia M. d’Otremont avec embarras, car la question était en effet embarrassante, — je… je… ne sais…
— Votre honneur, si chatouilleux d’ordinaire, monsieur, subira donc piteusement, cette fois, un outrage… une provocation ?…
— Si ce jeune homme m’outrageait, je… je…
— Il vous outragera… et cela, de la façon la plus sanglante… je vous en donne ma parole. Ainsi, — poursuivit madame de Hansfeld avec un redoublement d’ironie, — ainsi, vous endurerez honteusement une offense… par cela seulement qu’en la vengeant vaillamment, loyalement, l’épée à la main, vous seriez certain d’être aimé de moi !
— M. Maurice Dumirail, — dit à haute voix un valet de chambre vêtu de noir, qui, après avoir discrètement frappé à la porte du boudoir de madame de Hansfeld, annonçait et introduisait le jeune provincial.