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incurable, en lui imposant une dégradante tutelle ; mère, lui refuse tout droit, tout pouvoir sur ses enfants[1], et créature humaine enfin, l’asservit, l’enchaîne à jamais au bon plaisir d’une autre créature humaine, sa pareille et son égale devant Dieu[2]. Vous savez, mon ami…, ajouta la jeune fille avec une exaltation passionnée, vous savez combien je vous honore, vous dont le père a été nommé le Père du Généreux ; je ne crains donc pas, noble et valeureux cœur, de vous voir user contre moi de ces droits tyranniques ;… mais de ma vie je n’ai menti, et notre amour est trop saint, trop céleste pour être soumis à une consécration achetée par un double parjure ;… non, jamais

  1. Au père seul est réservé de diriger l’éducation des enfants ; le père seul a le droit d’autoriser leur mariage, que la mère y consente ou non, peu importe ; et pourtant qui ne sait l’admirable sagacité, le merveilleux instinct du cœur maternel, surtout lorsqu’il s’agit de sa fille ?
  2. La femme doit suivre partout son mari, depuis la glace des pôles jusqu’à la zone torride inclusivement, quels que soient les goûts, la santé de la créature enchaînée aux caprices masculins, fût-il mortel à son cœur de quitter une mère ou des enfants adorés ; l’homme peut aussi empêcher la famille de sa femme de mettre les pieds chez lui, il jouit en un mot de bien d’autres jolis… jolis droits du seigneur ! qu’il serait trop long d’énumérer ici.