Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 9-10.djvu/253

Cette page a été validée par deux contributeurs.

— « Je suis en effet l’homme le plus heureux du monde, a répondu le maréchal, car je vais avec joie et bonheur remplir un devoir sacré. »

Les trois acteurs de cette scène se regardèrent en silence.

— Et qui a pu amener ce brusque changement dans l’esprit du maréchal ? dit la princesse d’un air pensif ; on comptait au contraire sur des chagrins, sur des irritations de toute sorte, pour le jeter dans cette aventureuse entreprise.

— Je m’y perds, dit Rodin en réfléchissant ; mais il m’importe, il est parti ; il ne faut pas perdre un moment pour agir sur ses filles… A-t-il emmené ce maudit soldat ?

— Non,… dit le père d’Aigrigny, malheureusement non… ; mis en défiance et instruit par le passé, il va redoubler de précautions, et un homme qui aurait pu, dans un cas désespéré, nous servir contre lui… vient d’être frappé par la contagion.

— Qui donc cela ? demanda la princesse.

— Morok… Je pouvais compter sur lui en tout, pour tout, partout… et il est perdu, car, s’il échappe à la contagion, il est à craindre qu’il ne succombe à un mal horrible et incurable.