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— Tu sais la haine que le maréchal avait déjà contre ce renégat d’abbé d’Aigrigny ; quand il a su que ce traître était ici, et qu’il avait poursuivi les deux orphelines, comme il avait poursuivi leur mère… jusqu’à la mort… mais qu’il s’était fait prêtre, j’ai cru que le maréchal allait devenir fou d’indignation et de fureur… Il voulait aller trouver le renégat ;… d’un mot je l’ai calmé.

« — Il est prêtre, lui ai-je dit ; vous aurez beau faire : l’injurier, le crosser, il ne se battra pas. Il a commencé par servir contre son pays, il finit par être un mauvais prêtre ; c’est tout simple ; ça ne vaut pas la peine de cracher dessus.

« — Mais il faut bien pourtant que je le punisse du mal qu’il a fait à mes enfants, et que je venge la mort de ma femme ! s’écriait le maréchal exaspéré.

« — Vous savez bien qu’on dit qu’il n’y a que les tribunaux qui peuvent vous venger, lui ai-je dit. Mademoiselle de Cardoville a déposé une plainte contre le renégat pour avoir voulu séquestrer vos enfants dans un couvent… Il faut ronger son frein… attendre… »

— Oui, dit tristement Agricol ; et malheureusement les preuves manquent contre l’abbé d’Aigrigny… L’autre jour, lorsque j’ai été interrogé par l’avocat de mademoiselle de Cardo-