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bibé de carmin[1], suivre et tracer avec une étonnante exactitude la silhouette de l’idéale figure que le délire de son imagination présentait à sa vue.

C’était devant ces lignes charmantes rehaussées du carmin le plus vif, que Djalma venait de se mettre en contemplation profonde, après avoir lu et relu, porté et reporté vingt fois à ses lèvres, la lettre qu’il avait reçue la veille au soir des mains de Dupont.

Djalma n’était pas seul.

Faringhea suivait tous les mouvements du prince d’un regard subtil, attentif et sombre ; se tenant respectueusement debout dans un coin du salon, le métis semblait occupé à déplier et étendre le bedej de Djalma, espèce de burnous en étoffe de l’Inde, tissu léger et soyeux, dont le fond brun disparaissait presque entièrement sous des broderies d’or ou d’argent d’une délicatesse exquise.

La figure du métis était soucieuse, sinistre. Il ne pouvait s’y méprendre, la lettre de mademoiselle de Cardoville, remise la veille par M. Dupont à Djalma devait seule causer son enivrement, car, sans doute, il se savait aimé ; dans

  1. Quelques curieux possèdent de pareilles esquisses, produits de l’art indien, d’une naïveté primitive.