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et remplie de caquetages sur des tiers (d’ailleurs personnages importants de cette histoire), on aurait pris ces trois révérends pères pour des hommes médiocres ou vulgaires et l’on se serait gravement trompé ; chacun, selon le rôle qu’il était appelé à jouer dans la troupe dévote, possédait quelque rare et excellent mérite, toujours accompagné de cet esprit audacieux et insinuant, opiniâtre et madré, flexible et dissimulé, particulier à la majorité des membres de la société. Mais grâce à l’obligation de mutuel espionnage imposé à chacun, grâce à la haineuse défiance qui en résultait et au milieu de laquelle vivaient ces prêtres, ils n’échangeaient entre eux que des banalités insaisissables à la délation, réservant toutes les ressources, toutes les facultés de leur esprit pour exécuter passivement la volonté du chef, joignant alors, dans l’accomplissement des ordres qu’ils en recevaient, l’obéissance la plus absolue, la plus aveugle quant au fond, et la dextérité la plus inventive, la plus diabolique, quant à la forme.

Ainsi, l’on nombrerait difficilement les riches successions, les dons opulents que les deux révérends pères, à figures si débonnaires et si fleuries, avaient fait entrer dans le sac toujours ouvert, toujours béant, toujours aspirant, de la