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plus profond, et qui semblait plus irrité que le premier, sortit cette fois du souterrain dont l’ouverture disparaissait à demi sous des broussailles artificielles, faciles à écarter. À ce rugissement, l’Anglais se leva debout de sa petite loge, en sortit presque à mi-corps, et se frotta vivement les mains ; puis complètement immobile, ses gros yeux verts, fixes et brillants, ne quittèrent plus l’entrée de la caverne.

À ces hurlements féroces, Djalma avait aussi tressailli, malgré toutes les excitations d’amour, de jalousie, de haine auxquelles il était en proie. La vue de cette forêt, les rugissements de la panthère, lui causèrent une émotion profonde en réveillant de nouveau le souvenir de son pays et de ces chasses meurtrières qui, comme la guerre, ont des enivrements terribles ; il eût tout à coup entendu des clairons et les gongs de l’armée de son père sonner l’attaque, qu’il n’eût pas été transporté d’une ardeur plus sauvage. Bientôt des grondements sourds, comme un tonnerre lointain, couvrirent presque les râlements stridents de la panthère : le lion et le tigre, Judas et Caïn, lui répondaient du fond du théâtre, où étaient leurs cages… À cet effrayant concert, dont ses oreilles avaient été tant de fois frappées au milieu des solitudes de l’Inde, lorsqu’il y campait pour la chasse ou