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ample cravate de batiste blanche, non moins roidement empesée que le col de chemise à coins arrondis qui atteignait presque le lobe de l’oreille. Le teint de cette figure extrêmement maigre et osseuse était pourtant fort coloré, presque pourpre, ce qui faisait encore valoir le vert étincelant des prunelles et le blanc du globe de l’œil ; la bouche fort grande, tantôt sifflotait imperceptiblement un air de gigue écossaise (toujours le même air), tantôt se relevait légèrement vers ses coins, contractée par un sourire sardonique.

L’Anglais était d’ailleurs mis avec une exquise recherche : son habit bleu à boutons de métal laissait voir son gilet de piqué blanc, d’une blancheur aussi irréprochable que son ample cravate ; deux magnifiques rubis formaient les boutons de sa chemise, et il appuyait sur le bord de la loge ses mains patriciennes soigneusement gantées de gants glacés.

Lorsque l’on savait le bizarre et cruel désir qui amenait ce parieur à toutes ces représentations, sa grotesque figure, au lieu d’exciter un rire moqueur, devenait presque effrayante ; l’on comprenait alors l’espèce d’épouvantable cauchemar causé à Morok par ces deux gros yeux ronds et fixes qui semblaient patiemment attendre la mort du dompteur de bêtes (et