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les sens, comme s’il eût cherché une arme autour de lui, poussant de temps à autre une sorte de cri rauque, qu’il tâchait d’étouffer en portant ses deux poings crispés à sa bouche ; tandis que ses mâchoires tressaillaient convulsivement… c’était la rage impuissante de la bête féroce altérée de carnage.

Le jeune Indien était ainsi d’une beauté grande et sauvage ; on sentait que ces divins instincts, d’une ardeur sanguinaire et d’une aveugle intrépidité, alors exaltés à ce point par l’horreur de la trahison et de la lâcheté, dès qu’ils s’appliquaient à la guerre ou à ces chasses gigantesques de l’Inde, plus meurtrières encore que la bataille, devaient faire de Djalma ce qu’il était : un héros.

Rodin admirait avec une joie sinistre et profonde la fougueuse impétuosité des passions de ce jeune Indien, qui, dans des circonstances données, devaient faire des explosions terribles. Tout à coup, à la grande surprise du jésuite, cette tempête se calma. La fureur de Djalma s’apaisa presque subitement, parce que la réflexion lui en démontra bientôt la vanité. Alors, honteux de cet emportement puéril, il baissa les yeux. Sa figure resta pâle et sombre ; puis avec une tranquillité froide, plus redoutable encore que la violence à laquelle il