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— Oui, ma chère demoiselle, de l’enthousiasme !… Que ce mot ne choque pas votre modestie ; sachez donc que ces idées si neuves, si indépendantes, si courageuses, que vous exposiez avec tant d’éclat devant votre tante, vous sont à votre insu presque communes avec une personne pour laquelle vous ressentirez plus tard le plus tendre, le plus religieux respect…

— Et de qui voulez-vous parler, monsieur ? s’écria mademoiselle de Cardoville, de plus en plus intéressée.

Après un moment d’hésitation apparente, Rodin reprit :

— Non… non… il est inutile maintenant de vous en instruire… Tout ce que je puis vous dire, ma chère demoiselle, c’est que, ma lecture finie, je courus chez l’abbé d’Aigrigny afin de le convaincre de l’erreur où je le voyais à votre égard… Impossible de le joindre… mais hier matin, je lui ai dit vivement ma façon de penser ; il ne parut étonné que d’une chose, de s’apercevoir que je pensais. Un dédaigneux silence accueillit toutes mes instances. Je crus sa bonne foi surprise ; j’insistai encore, mais en vain ; il m’ordonna de le suivre à la maison où devait s’ouvrir le testament de votre aïeul. J’étais tellement aveuglé sur l’abbé d’Aigrigny qu’il fallut, pour m’ouvrir les yeux, l’arrivée