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— Et qui a osé faire, monsieur, une dénonciation aussi calomnieuse ? s’écria le docteur Baleinier avec une indignation chaleureuse ; qui a eu l’audace d’accuser un homme respectable, et, j’ose le dire, respecté à tous égards, d’avoir été complice de cette infamie ?

— C’est… moi…, dit froidement Rodin.

— Vous !… s’écria le docteur Baleinier.

Et reculant de deux pas il resta comme foudroyé.

— C’est moi… qui vous accuse, reprit Rodin d’une voix nette et brève.

— Oui, c’est monsieur qui, ce matin même, muni de preuves suffisantes, est venu réclamer mon intervention en faveur de mademoiselle de Cardoville, dit le magistrat en se reculant d’un pas, afin qu’Adrienne pût apercevoir son défenseur.

Jusqu’alors, dans cette scène, le nom de Rodin n’avait pas encore été prononcé ; mademoiselle de Cardoville avait entendu souvent parler du secrétaire de l’Abbé d’Aigrigny sous de fâcheux rapports ; mais ne l’ayant jamais vu, elle ignorait que son libérateur n’était autre que ce jésuite ; aussi jeta-t-elle aussitôt sur lui un regard mêlé de curiosité, d’intérêt, de surprise et de reconnaissance.

La figure cadavéreuse de Rodin, sa laideur