Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 5-6.djvu/215

Cette page a été validée par deux contributeurs.

corne, dont la lame aiguë était aux trois quarts usée, coupa alternativement un morceau de pain et un morceau de radis, et commença son frugal repas avec un appétit robuste, l’œil fixé sur l’aiguille de sa montre…

L’heure fatale atteinte, Robin décacheta l’enveloppe d’une main tremblante.

Elle contenait deux lettres.

La première parut le satisfaire médiocrement ; car, au bout de quelques instants, il haussa les épaules, frappa impatiemment sur la table avec le manche de son couteau, écarta dédaigneusement cette lettre du revers de sa main crasseuse, et parcourut la seconde missive, tenant son pain d’une main, et, de l’autre, trempant par un mouvement machinal une tranche de radis dans le sel gris répandu sur un coin de la table.

Tout à coup, la main de Rodin resta immobile. À mesure qu’il avançait dans sa lecture, il paraissait de plus en plus intéressé, surpris, frappé.

Se levant brusquement, il courut à la croisée, comme pour s’assurer, par un second examen des chiffres de la lettre, qu’il ne s’était pas trompé, tant ce qu’on lui annonçait lui paraissait inattendu.

Sans doute Rodin reconnut qu’il avait bien