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mettes saillantes jetaient une ombre assez dure sur ses joues creuses et ridées. Sa physionomie était remplie d’intelligence, de finesse et de sagacité. Son front, large, élevé, annonçait la droiture, la franchise et la fermeté ; ses yeux, noirs et brillants comme les yeux arabes, avaient un regard à la fois pénétrant et doux.

Sa femme Bethsabée, de quinze ans moins âgée que lui, était de haute taille et entièrement vêtue de noir. Un bonnet plat, en linon empesé, qui rappelait la sévère coiffure des graves matrones hollandaises, encadrait son visage pâle et austère, autrefois d’une rare et fière beauté, d’un caractère tout biblique ; quelques plis du front, provenant du froncement presque continuel de ses sourcils gris, témoignaient que cette femme était souvent sous le poids d’une tristesse profonde.

À ce moment même, la physionomie de Bethsabée trahissait une douleur inexprimable : son regard était fixe, sa tête penchée sur sa poitrine ; elle avait laissé retomber sur ses genoux sa main droite dont elle tenait un petit carnet ; de son autre main, elle serrait convulsivement une grosse tresse de cheveux noirs comme le jais qu’elle portait au cou. Cette natte épaisse était garnie d’un fermoir en or d’un pouce carré ; sous une plaque de cristal