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La reine Bacchanal s’appuyait d’une main sur l’épaule de Rose-Pompon qu’elle dominait de toute la tête.

La sœur de la Mayeux présidait véritablement en souveraine à cette folle ivresse, que sa seule présence semblait inspirer, tant son entrain, sa bruyante animation avaient d’influence sur son entourage.

C’était une grande fille de vingt ans environ, leste et bien tournée, aux traits réguliers, à l’air joyeux et tapageur ; ainsi que sa sœur, elle avait de magnifiques cheveux châtains et de grands yeux bleus ; mais, au lieu d’être doux et timides comme ceux de la jeune ouvrière, ils brillaient d’une infatigable ardeur pour le plaisir. Telle était l’énergie de cette organisation vivace, que malgré plusieurs nuits et plusieurs jours passés en fêtes continuelles, son teint était aussi pur, sa joue aussi rose, son épaule aussi fraîche, que si elle fût sortie le matin même de quelque paisible retraite.

Son déguisement, quoique bizarre et d’un caractère singulièrement saltimbanque, lui seyait pourtant à merveille. Il se composait d’une sorte de corsage juste en drap d’or et à longue taille, garni de grosses bouffettes de rubans incarnats qui flottaient sur ses bras nus, et d’une courte jupe aussi en velours incarnat, ornée de passe-