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veau la foule en se portant en avant avec enthousiasme, de sorte que la Mayeux, sans le vouloir, se trouva portée, au premier rang, parmi les gens empressés de voir défiler cette mascarade.

C’était en effet un curieux spectacle.

Un homme à cheval, déguisé en postillon, veste bleue brodée d’argent, queue énorme d’où s’échappaient des flots de poudre, chapeau orné de rubans immenses, précédait la première voiture, en faisant claquer son fouet, et criant à tue-tête :

— Place ! place à la reine Bacchanal et à sa cour !…

Dans ce landau découvert, traîné par quatre chevaux étiques, montés par deux vieux postillons vêtus en diables, s’élevait une véritable pyramide d’hommes et de femmes, assis, debout, perchés, tous dans les costumes les plus fous, les plus grotesques, les plus excentriques : c’était un incroyable fouillis de couleurs éclatantes, de fleurs, de rubans, d’oripeaux et de paillettes. De ce monceau de formes et d’accoutrements bizarres sortaient des têtes grotesques ou gracieuses, laides ou jolies, mais toutes animées par l’excitation fébrile d’une folle ivresse, mais toutes tournées par une expression d’admiration fanatique vers la seconde voiture où