Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 3-4.djvu/285

Cette page a été validée par deux contributeurs.

ne doutant pas cette fois que ce ne fût Dagobert, elle s’assit précipitamment, essuya ses yeux à la hâte, et, pour se donner une contenance, prit sur ses genoux un sac de grosse toile grise qu’elle eut l’air de coudre, car ses mains vénérables tremblaient si fort, qu’elles pouvaient à peine tenir son aiguille.

Au bout de quelques minutes, la porte s’ouvrit.

Dagobert parut.

La rude figure du soldat était sévère et triste ; en entrant il jeta violemment son chapeau sur la table, ne s’apercevant pas, tout d’abord, de la disparition des orphelines, tant il était péniblement préoccupé.

— Pauvre enfant… c’est affreux ! s’écria-t-il.

— Tu as vu la Mayeux ?… tu l’as réclamée ? dit vivement Françoise, oubliant un moment ses craintes.

— Oui, je l’ai vue, mais dans quel état ! c’était à fendre le cœur ; je l’ai réclamée, et vivement, je t’en réponds ; mais on m’a dit : « Il faut, avant, que le commissaire aille chez vous pour… »

Puis Dagobert, jetant un regard surpris dans la chambre, s’interrompit et dit à sa femme :

— Tiens… où sont donc les enfants ?…

Françoise se sentit saisie d’un frisson glacé.

Elle dit d’une voix faible :