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lever de Rose et de Blanche, les avait engagées à dire leur prière du matin ; elles lui répondirent naïvement qu’elles n’en savaient aucune, et qu’elles ne priaient jamais autrement qu’en invoquant leur mère qui était dans le ciel.

Lorsque Françoise, émue d’une douloureuse surprise, leur parla de catéchisme, de confirmation, de communion, les deux sœurs ouvrirent de grands yeux étonnés, ne comprenant rien à ce langage.

Selon sa foi candide, la femme de Dagobert, épouvantée de l’ignorance des deux jeunes filles en matière de religion, crut leur âme dans un péril d’autant plus grave, d’autant plus menaçant, que leur ayant demandé si elles avaient au moins reçu le baptême (et elle leur expliqua la signification de ce sacrement), les orphelines lui répondirent qu’elles ne le croyaient pas, car il ne se trouvait ni église ni prêtre dans le hameau où elles étaient nées pendant l’exil de leur mère en Sibérie.

En se mettant au point de vue de Françoise, on comprendra ses terribles angoisses ; car, à ses yeux, ces jeunes filles, qu’elle aimait déjà tendrement, tant elles avaient de charme et de douceur, étaient, pour ainsi dire, de pauvres idolâtres, innocemment vouées à la damnation éternelle ; aussi, n’ayant pu retenir ses larmes