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— Tu pleures… mon cher enfant… Mais, mon Dieu ! qu’y a-t-il donc ? Tu me fais peur !…

— Peur… oh ! non… au contraire ! dit Agricol, en essuyant ses yeux ; vous allez être bien heureuse… Mais, encore une fois, il faut être raisonnable… parce que la trop grande joie fait autant mal que le trop grand chagrin…

— Comment ?

— Je vous le disais bien… moi, qu’il arriverait…

— Ton père ! s’écria Françoise.

Elle se leva de son fauteuil.

Mais sa surprise, son émotion furent si vives, qu’elle mit une main sur son cœur pour en comprimer les battements… puis elle se sentit faiblir.

Son fils la soutint et l’aida à se rasseoir.

La Mayeux s’était jusqu’alors discrètement tenue à l’écart pendant cette scène, qui absorbait complètement Agricol et sa mère ; mais elle s’approcha timidement, pensant qu’elle pouvait être utile, car les traits de Françoise s’altéraient de plus en plus.

— Voyons, du courage, ma mère, reprit le forgeron ; maintenant le coup est porté… il ne vous reste plus qu’à jouir du bonheur de revoir mon père.

— Mon pauvre Baudoin… après dix-huit ans