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vêtir et se chauffer, 91 centimes par semaine[1].

Par un rare bonheur, elle se trouvait dans une position exceptionnelle ; afin de ne pas blesser sa délicatesse qui était extrême, Agricol s’entendait avec le portier, et celui-ci avait loué à la jeune fille, moyennant douze francs

  1. Quelques-uns de ces détails statistiques, que nous avons soumis à une épreuve contradictoire, et qui se sont trouvés encore plus affligeants que nous ne les avons montrés, sont empruntés à un excellent travail de M. Janoma, ouvrier mécanicien, publié dans la Ruche Populaire, journal rédigé par des ouvriers avec autant de mesure que de sincérité, sous la direction de M. Duquesne, ouvrier imprimeur. M. Janoma ajoute, et il ne dit que trop vrai :

    « Nous avons vu des femmes et des enfants vivre des mois entiers de soupe sans beurre ni graisse ; c’était du pain que l’on faisait bouillir dans l’eau avec une poignée de sel. »

    M. Janoma fait ensuite remarquer avec raison que l’ouvrière ne peut pas acheter ses provisions en gros, le maître n’ayant pas toujours du travail à lui donner ; ainsi elle est souvent obligée d’acheter une livre de pain, un sou de sel, une chandelle, etc., etc. ; il y a donc encore perte pour elle, les fractions étant toujours au profit du détaillant.

    Nous ajouterons, nous, qu’en toutes circonstances le pauvre paye presque doublement plus cher que le riche, parce que le premier est obligé d’acheter en détail et sans crédit. Ainsi la valeur d’une voie de bois prise en détail par falourdes revient au pauvre à plus de 75 francs la voie.