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nation, sa stupeur augmentaient avec la réflexion ; les deux jeunes filles qu’on venait de sauver avaient quinze ans ; elles étaient vêtues de deuil ; elles se ressemblaient à s’y méprendre ; l’une portait au cou une médaille de bronze ; il n’en pouvait plus douter, il s’agissait des filles du général Simon. Comment les deux sœurs étaient-elles au nombre des naufragés ? Comment étaient-elles sorties de la prison de Leipzig ? Comment n’en avait-il pas été instruit ? S’étaient-elles évadées ? avaient-elles été mises en liberté ? Comment n’en avait-il pas été averti ? Ces pensées secondaires, qui se présentaient en foule à l’esprit de M. Rodin, s’effaçaient devant ce fait :

« Les filles du général Simon étaient là. »

Sa trame, laborieusement ourdie, était anéantie.

— Quand je te parle du sauveur de ces deux jeunes filles, reprit le régisseur en s’adressant à sa femme et sans remarquer la préoccupation de M. Rodin, tu t’attends peut-être, d’après cela, à voir un Hercule ? et bien ! tu n’y es pas… c’est presque un enfant, tant il a l’air jeune, avec sa jolie figure douce et ses grands cheveux blonds… Enfin, je lui ai laissé un manteau, car il n’avait que sa chemise et une culotte courte noire avec des bas de laine